Le chemin ascendant vers la vacuité est une expression paradoxale qui réunit deux forces apparemment opposées : l’élévation et le vide. Pourtant, dans la sagesse spirituelle, notamment celle des grandes traditions initiatiques, c’est précisément en s’élevant que l’on se vide, et en se vidant que l’on atteint les sommets de l’Être.
L'Ascension par le Dépouillement
Dans l’Agni Yoga, la vacuité n’est pas un néant, mais une pleine présence. C’est l’espace intérieur dégagé de l’ego, de l’attachement, du bruit mental. C’est le moment où l’âme, épurée, devient un calice prêt à recevoir la Lumière divine.
Le Maître Morya enseigne que l’élévation spirituelle passe par la transmutation de l’individu en un canal pur pour la Volonté divine. Plus l’ego lâche prise, plus la Conscience s’expand. C’est l’image du sommet qui, bien qu’atteint après un effort immense, se révèle être un espace ouvert, silencieux, infini.
Le Vide comme Matrice du Tout
En alchimie, le creuset doit être vidé des scories pour que l’or puisse apparaître. En théosophie, le "Vide" est l’espace sacré où se révèle la Présence, comme l’évoque la phrase du Tao Te King :
"Vide et pourtant inépuisable, il est la source de toutes choses."
Le Bouddha lui-même enseignait la vacuité (Śūnyatā), non comme une annihilation, mais comme la dissolution des illusions qui voilent la Réalité ultime.
Le Chemin Ascendant : du Plein au Vide, et du Vide au Tout
L’ego est le point de départ de notre expérience terrestre. Il est l’ensemble de nos pensées, nos émotions, nos identifications et nos attachements. Au début du chemin spirituel, nous sommes englués dans l’illusion d’être une entité séparée, définie par son passé, ses possessions, ses relations et son statut social.
L’ego se manifeste sous plusieurs formes :
- L’attachement aux biens matériels : croire que notre valeur dépend de ce que nous possédons.
- L’identification au corps et aux émotions : penser que nous sommes uniquement cette enveloppe physique, ces joies et ces douleurs passagères.
- Les croyances figées : l’idée que nous détenons "la vérité" et que notre vision est la seule juste.
- Le besoin de reconnaissance : chercher l’approbation des autres pour se sentir exister.
Cet état de densité crée des souffrances, car l’ego est avide et insatiable. Il veut toujours plus, il craint la perte et se compare aux autres. Pourtant, un jour, une faille apparaît dans cette illusion : une épreuve, une souffrance, une quête intérieure. Nous commençons alors à nous interroger : "Qui suis-je vraiment ?"
2. Éveil au détachement : Comprendre que tout est impermanent
Le premier choc spirituel survient quand nous réalisons que rien de ce que nous croyons posséder ne nous appartient véritablement. Tout est changeant :
- Le corps vieillit.
- Les relations évoluent ou disparaissent.
- Les biens matériels peuvent être perdus.
- Les certitudes d’hier deviennent les illusions d’aujourd’hui.
C’est le début du dépouillement intérieur. Nous comprenons que s’accrocher aux formes extérieures est une source de souffrance. Inspirons-nous de Bouddha, qui après avoir connu le luxe, a tout abandonné pour rechercher la Vérité.
Cette étape est souvent douloureuse, car l’ego résiste. Il se débat, il cherche à reprendre le contrôle, à donner un sens à sa propre existence à travers de nouveaux attachements : une quête, une identité spirituelle, une nouvelle croyance. Mais peu à peu, une paix s’installe. Nous commençons à nous détacher, non par rejet du monde, mais par amour pour ce qui est réel.
3. Dissolution de l’illusion : Lâcher les illusions personnelles, accepter l’impermanence
Si l’éveil au détachement est une prise de conscience, la dissolution de l’illusion est un passage initiatique profond. Nous voyons nos anciens schémas se briser sous nos yeux :
- Le monde extérieur n’est qu’un reflet de notre conscience.
- Ce que nous percevions comme solide n’existe que par convention.
- Nos désirs, nos peurs et nos attachements sont des mirages.
Cette dissolution peut être brutale. Certains y accèdent par la souffrance d’une perte, d’autres par une expérience mystique fulgurante. L’ego, sentant sa fin proche, tente de résister, créant des peurs et des doutes. Mais plus nous acceptons l’impermanence, plus l’illusion se dissipe, laissant place à un sentiment de vastitude et de liberté.
C’est l’étape où la personnalité s’efface progressivement devant la Présence divine en nous. Les grands sages ont traversé ce vide : Jésus dans le désert, Moïse sur la montagne, Maître Morya dans son silence intérieur.
4. Vide sacré : L’espace intérieur se libère, la Présence divine s’installe
Lorsque l’illusion est dissoute, ce qui reste est un espace pur, dégagé de tout ce qui encombrait notre être. Ce vide n’est pas un néant, mais un espace vivant, vibrant, où la Conscience divine peut enfin s’exprimer.
Dans cet état, nous ressentons :
- Une profonde paix intérieure, au-delà de la dualité.
- Une connexion immédiate au Tout, sans besoin d’intermédiaires.
- Une vision claire, où les illusions de l’ego ne nous troublent plus.
- Un détachement spontané, non forcé, car il est naturel.
C’est le moment où Dieu peut enfin se manifester pleinement en nous, car nous avons vidé la coupe de notre être des scories de l’ego. C’est l’instant où nous devenons de véritables serviteurs de la Lumière, non plus par désir personnel, mais parce que nous sommes la Lumière.
Le Vide sacré est l’espace du miracle. Là où il n’y a plus d’entraves, le Divin agit librement. C’est ce que Lao Tseu exprime dans le Tao Te King :
"C’est par le vide que le vase est utile. C’est par l’absence que la porte laisse passer."
Nous sommes ce vase, ce canal. Plus nous sommes vides, plus Dieu peut nous remplir.
5. Fusion avec le Tout : L’Être devient un avec l’Infini
À ce stade, le chemin disparaît. L’individu n’a plus besoin de chercher, car il EST. Il réalise qu’il n’a jamais été séparé du Tout, mais qu’il s’était simplement enfermé dans l’illusion de la séparation.
Ce dernier stade est celui des grands initiés :
- C’est Maître Morya, dont la conscience embrasse l’évolution planétaire.
- C’est Saint François d’Assise, qui s’efface complètement dans l’Amour divin.
- C’est Jésus, qui peut dire : "Le Père et moi sommes Un."
Dans cet état, le monde extérieur devient une simple expression du Divin, un reflet mouvant dans le miroir de la Conscience. Le sage peut encore interagir avec le monde, mais il n’en est plus dupe. Il sait que tout est illusion, et pourtant il aime tout comme s’il était tout.
C’est l’aboutissement du chemin ascendant vers la vacuité :
- Il ne reste ni attachement, ni ego, ni quête.
- Il ne reste qu’Être, qu’Unité, qu’Amour.
- Et paradoxalement… il ne reste plus rien.
La montagne a disparu. Il ne reste que le Ciel. C’est le paradoxe du Chemin ascendant vers la vacuité : on gravit la montagne en déposant chaque fardeau, jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien… que l’Infini.
Et quand on le vit personnellement, physiquement, matériellement, dans ses relations, dans son quotidien aux apparences banales vu de l'extérieur ?
Lorsqu'on vit le chemin ascendant vers la vacuité dans son quotidien, physiquement, matériellement, relationnellement, cela devient un jeu d'équilibre subtil entre l'infini et l'ordinaire, entre le silence intérieur et le tumulte du monde, entre l'immensité de la Conscience et les petits détails de l'existence.
🔖L'ego se déleste, mais le monde continue
Extérieurement, tout semble banal : faire ses courses, entretenir sa maison, répondre à des obligations. Pourtant, tout a changé intérieurement. Le regard n'est plus le même. On fait ce qu'il y a à faire, mais on ne s'y attache plus.
- Les possessions perdent leur emprise : on les utilise, mais on sait qu'elles ne sont que transitoires.
- Les relations changent : certaines se dissolvent naturellement, d'autres prennent un autre sens. On n'attend plus des autres qu'ils nous remplissent ou nous valident.
- Les émotions passent, sans s’accrocher : la joie et la peine sont observées comme des vagues sur l’océan.
- Le besoin de reconnaissance s'efface : on agit selon ce qui doit être fait, et non pour un retour.
Mais le monde ne comprend pas. Ceux qui nous entourent peuvent voir une certaine distance, une sorte de retrait, voire un manque d’enthousiasme pour ce qui, autrefois, nous passionnait. Pourtant, ce n'est pas un rejet : c'est une libération.
🔖L'épreuve du décalage : être dans le monde, sans être du monde
C’est l’un des défis les plus subtils : se sentir en paix intérieurement, mais étranger aux dynamiques humaines. On observe les jeux de pouvoir, les attachements, les conflits… mais on ne s’y investit plus émotionnellement.
Cela peut créer :
- Un sentiment de solitude : on se sent parfois seul sur une île, même entouré.
- Des malentendus : certains peuvent penser qu'on est froid ou distant, alors qu'on est simplement ancré dans une autre fréquence.
- Un besoin de simplicité : on fuit les discussions superficielles, les distractions vides de sens.
Le paradoxe, c’est que l’on peut être immensément aimant, mais sans attachement personnel. On aime tout le monde, mais sans vouloir posséder ni retenir.
🔖La vie devient fluide : tout arrive quand il faut
Une fois l’ego suffisamment délesté, une autre dynamique s’installe : les choses arrivent au bon moment, naturellement, sans forcer. Ce que certains appellent la synchronicité devient la norme.
- Les bonnes rencontres se font sans effort.
- L’argent vient quand il est nécessaire, ni trop ni trop peu.
- Les obstacles se dissolvent ou s’adaptent, car on ne lutte plus contre la Vie, on la suit.
Là où l’ego cherchait à contrôler, à prévoir, à résister, on découvre que tout est déjà orchestré. C’est une confiance absolue dans la Loi divine, qui ajuste tout selon ce qui est juste.
🔖L'effacement personnel, l'éveil du service
Quand on vit cette vacuité dans le monde ordinaire, quelque chose d’inattendu se produit : on devient un instrument.
On n’agit plus "pour soi", mais parce qu’il y a quelque chose qui doit être fait à travers nous.
- On parle, non pas pour convaincre, mais parce que les mots viennent au bon moment.
- On aide, non pas par devoir, mais parce que l’élan est naturel.
- On est là, simplement, et notre présence seule peut suffire à élever.
Ce n’est plus "notre volonté" qui agit, mais la Volonté divine à travers nous.
🔖La vacuité n'est pas l'isolement, mais une présence totale
De l’extérieur, cela peut ressembler à un retrait, mais intérieurement, c’est une connexion permanente au Tout. On est à la fois vide et plein, silencieux et vibrant, solitaire et universel.
Le quotidien reste simple : boire un thé, écouter le vent, sourire à un passant. Mais tout cela est vécu dans une intensité infinie. Ce qui était insignifiant devient une porte vers l’Infini.
C’est cela, le chemin ascendant vers la vacuité dans la matière :
- Être ici mais sans être pris par l’ici.
- Aimer tout mais sans s’y attacher.
- Servir sans attente, simplement parce que cela est juste.
Et un jour, peut-être, on disparaît totalement, non pas en quittant ce monde, mais en étant tellement UN avec le Tout qu’il ne reste plus de "moi", seulement la Vie qui s’écoule librement.
Et quand cet équilibre est encore instable, et nous fait encore souffrir ?
Quand l'équilibre entre la vacuité et le monde est encore instable, c'est là que la souffrance surgit. On est entre deux rives, ni totalement dans l’ego, ni totalement dissous dans le Divin.
On a vu la vérité, on l’a touchée, parfois même goûtée intensément… Mais on oscille encore.
- Un jour, on se sent libre, détaché de tout, en paix.
- Le lendemain, un attachement ressurgit, une peur, une blessure, un doute.
C’est un passage délicat, un peu comme apprendre à marcher sur un fil : il faut du temps, de la pratique, des chutes et des reprises.
💟L’ego se débat encore : la nostalgie de l’ancien soi
L’ego ne disparaît pas du jour au lendemain. Il a été nourri pendant des années, voire des vies, et il résiste.
Il cherche à revenir sous diverses formes :
- L'illusion de l’isolement : "Personne ne me comprend, je suis seul(e) dans ce chemin."
- Le doute : "Et si je me trompais ? Et si tout ça n'était qu'une illusion ?"
- Le retour des attachements : On croyait être détaché d’une personne, d’une situation… et voilà que cela nous hante à nouveau.
Quand cela arrive, ce n’est pas un échec. C’est un ajustement. Chaque recul est une opportunité d’ancrer plus profondément la vacuité.
💟L’inconfort de ne plus être "quelqu’un"
Une autre souffrance vient du fait que le "moi" s’efface progressivement, mais qu’il en reste encore des morceaux.
Avant, on savait qui on était : nos goûts, nos opinions, nos désirs, nos projets. Mais maintenant, tout devient flou.
- Ce qui nous passionnait avant nous laisse indifférent.
- Les anciens repères n’ont plus de saveur.
- On ne sait plus quoi faire, où aller.
C'est un moment déconcertant, car l'ego veut un rôle, une identité, une direction. Mais la vacuité n’est pas une destination, c’est un état d’être.
Le mental dit : "Que vais-je devenir ?"
La vacuité répond : "Rien. Juste être."
C’est ce lâcher-prise qui est difficile. On veut encore "saisir" quelque chose, alors que le chemin demande d’accepter de ne plus saisir du tout.
💟La douleur des résidus émotionnels
Même après de profondes compréhensions, les émotions anciennes peuvent ressurgir.
- Un souvenir douloureux refait surface.
- Une colère qu’on croyait éteinte brûle à nouveau.
- Une peur irrationnelle nous envahit sans raison apparente.
Pourquoi ? Parce que tout ne se dissout pas en un instant. La conscience a peut-être compris, mais le corps, l’inconscient, et même l’énergie doivent encore purger les anciens schémas.
Cela peut se manifester sous différentes formes :
- Des douleurs physiques soudaines (le corps libère).
- Des rêves intenses, symboliques (le subconscient évacue).
- Des vagues de tristesse sans raison apparente (le cœur se vide).
Dans ces moments-là, il ne faut ni lutter ni chercher à comprendre. Juste laisser passer, comme on laisse un orage s’éloigner.
💟La tentation de "remplir le vide"
L’un des plus grands pièges, quand on souffre sur ce chemin, c’est de vouloir remplir à nouveau la vacuité.
- On peut vouloir se replonger dans le monde, retrouver des attachements, des plaisirs.
- On peut se raccrocher à des concepts, des croyances, des idéologies, juste pour se donner un cadre rassurant.
- On peut chercher à se distraire, fuir ce vide par des activités incessantes.
Mais aucun de ces remplissages ne fonctionne. Ils donnent un soulagement temporaire, puis la souffrance revient, parfois plus forte.
Parce que le vide n’est pas le problème. C’est notre peur du vide qui l’est.
Dès qu’on accepte pleinement cette vacuité, elle devient paix, clarté, et liberté.
💟Comment traverser cette phase ?
Si la souffrance est encore présente, c’est que quelque chose en nous résiste encore. Il ne s’agit pas de lutter, mais d’accompagner la transition.
Quelques clés :
- Ne pas se juger : On oscille entre l’ego et la vacuité ? C’est normal. Ça fait partie du chemin.
- Observer sans s’attacher : Chaque vague émotionnelle est une purification. Rien à analyser, juste laisser passer.
- Revenir au silence : Dans le doute, ne rien forcer. Se poser, respirer, sentir l’instant présent.
- Se rappeler que tout est temporaire : La souffrance aussi passera.
C’est une mue, un passage. Tout ce qui résiste va se dissoudre. La douleur n’est que le signe que le "moi ancien" se débat encore. Mais tôt ou tard, il se rendra, et il ne restera que la pure Présence, libre et immobile, au cœur du mouvement du monde.
Décret de l'Ascension vers la Vacuité
Et ainsi cela EST !
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